24/03/2013
Sohravardî, le Nord au-delà du nord.
A propos de la Théognosis persane, voir aussi dans Fin Mars.Les Hirondelles, les chapitres 9 ( Clavis hermeneutica, notes sur Henry Corbin), 10 ( Notes sur le Livre de l'Homme Parfait d'Azïzoddîn Nasafî) et 11 (Le voyage intérieur).
Fin mars. Les hirondelles, éditions Arma Artis:
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21/03/2013
Notes sur l'oeuvre de Pierre Boutang. Extrait de "Lux umbra dei", éditions Arma Artis.
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20/03/2013
Oniromancie. Au-delà des portes de corne et d'ivoire... Un récit de Luc-Olivier d'Algange
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18/03/2013
Quand l'érudition n'est pas un jeu gratuit de l'esprit mais une aventure de l'âme.
Article paru dans Valeurs actuelles, N° 2810:
Profil
Pour cet auteur rare, familier des moralistes européens et des mystiques persans, l'art d'écrire s'apparente à une alchimie.
Cocteau disait que les poètes vivaient très au-dessus des moyens de leur époque; le mot pourrait servir de légende à un portrait de Luc-Olivier d'Algange. Voilà un homme rare, qui unit tous les sens du mot à commencer par le premier, le plus méconnu - le plus rare... - où l'emploie Virgile: léger, mais non par ce que l'on entend par là d'ordinaire, de cette légèreté regrettable qui n'est que l'effervescence de la sottise, tout au contraire, ce qui ne pèse pas. Et tant que nous en sommes au latin, un autre mot vient aussitôt à l'esprit, et à la plume, s'agissant de lui: longanime, d'emploi si rare de nos jours qu'il n'y a plus que les vieux dictionnaires qui le connaissent. C'est pourtant la vertu la plus aimable, cette égalité d'humeur, et d'humeur précisément légère qui est la forme la plus naturelle et la plus délicate et la plus française aussi, de politesse à l'égard des êtres et des choses.
Luc-Olivier d'Algange est poète comme on respire, et l'on ne peut pas dire, comme M. Gracq le disait de la littérature contemporaine, qu'il "respire mal": est-ce que l'âme du monde respire mal ? On le voit commensal d'André Suarès, interlocuteur de Pessoa, correspondant de Novalis, compagnon d'un de ces gentilshommes de plume et d'épée - du Bartas, d'Urfé - que les professeurs, qui se rassurent comme ils peuvent avec des étiquettes, diront "baroques". Mais encore, tout aussi bien et plus mystérieusement, de la suite de Pythagore et de Plotin, de Jamblique ou de ces mystiques persans dont il parle comme s'ils étaient ses voisins de campagne, sans la moindre pose.
Il aura beaucoup écrit en abandonnant ses pages à des revues, sans trop se soucier des "feuilles tombées" - il est bien trop courtois pour être gendelettre. Peu de volumes donc: le Manifeste baroque, le Traité de l'Ardente proximité, des poèmes, le Chant de l'âme du monde (Arma Artis), le Songe de Pallas, l'Ombre de Venise (Alexipharmaque) et ce livre: Fin mars. Les Hirondelles, dont le titre est emprunté à Joubert, le plus méconnu et peut-être le plus grand de nos moralistes. L'Etincelle d'or a pour sous-titre: "Notes sur la science d'Hermès"; pour Luc-Olivier d'Algange, l'art d'écrire tel qu'il le pratique est une forme d'alchimie.
Joubert définissait la poésie comme des "paroles d'air, et lumineuses": c'est ainsi que l'auteur nous parle, et comme l'intelligence est tout d'abord générosité, au lieu de parler de soi il dit volontiers son admiration en parlant d'écrivains, de philosophes ou de mystiques.
Que si, selon la formule de Raphaël - qui est la clef d'or de la vie de l'esprit -, "admirer c'est égaler", alors on remarquera que, loin de se contenter de faire écho à ses grands devanciers (qu'il s'appellent Henry Montaigu, René Guénon, Dominique de Roux, Ernst Jünger, Henry Corbin ou Gustave Thibon, Nicola Gomez Davila ou encore Azîzoddin Nasafî), il les continue, attentif à ces "idées dont l'entendement humain serait l'instrument de perception", qui aux antipodes de l'abstraction artificielle des concepts, sont les nuances infinies de la réalité qui s'offre à nous.
On pense en refermant le livre, à une autre citation de Joubert, sur la lecture de Platon "qui est comme l'air des montagne". Elle ne nourrit pas mais elle aiguise nos organes et donne le goût des bons aliments. Luc-Olivier d'Algange est sans doute l'un des plus platoniciens de nos auteurs.
Philippe Barthelet
*
De Luc-Olivier d'Algange, aux éditions Arma Artis:
Fin mars. Les hirondelles
Le chant de l'Ame du monde
Propos réfractaires
Lux umbra dei
aux éditions Alexipharmaque:
L'Ombre de Venise
Le Songe de Pallas
Lectures pour Frédéric II
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17/03/2013
Lettre sur la pauvreté et l'honneur
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16/03/2013
Chant de l'Etoile polaire, poème.
Extrait de Le Chant de l'Ame du monde, éditions Arma Artis:
Chant de l'Etoile polaire, version corrigée.docx
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15/03/2013
Les "carnets noirs" de Gabriel Matzneff
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14/03/2013
Fernando Pessoa, hétéronymes et "états multiples de l'être"
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13/03/2013
L'Icône et la vertu du paradoxe.
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Heidegger. Notes sur l'éclaircie de l'être.
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12/03/2013
Hommage à Stefan George
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11/03/2013
Un article de Michel Marmin.
Méditations altières
D'articles confidentiels en plaquettes précieuses, l'oeuvre philosophique et poétique de Luc-Olivier d'Algange paraissait définitivement vouée à la délectation et à l'édification des happy few. Mais ceux-ci étaient enclins à estimer qu'une divulgation plus large de ses écrits méditatifs était une tâche urgente, moins pour l'auteur lui-même, qui n'a cure de renommée, que pour tous ceux qui, sans le savoir, en étaient privés. C'est enfin chose faite avec la parution, coup sur coup, de deux livres, L'Etincelle d'or et L'Ombre de Venise. Deux livres parfaitement complémentaires, qui révèleront aux néophytes une philosophie altière, exprimée dans une langue somptueuse et excessivement châtiée.
Que dit en substance Luc-Olivier d'Algange ? Que "l'herméneutique est ce qui vivifie l'esprit sous les cendres de la lettre morte des religions réduites à leurs aspects extérieurs", que la science d'Hermès redevient alors un recours contre le totalitarisme de cette "transparence" chère aux nouveaux inquisiteurs, que la "tolérance" dont se gargarisent les donneurs de leçon peut être "obscurantiste" , que le secret est la condition même de la liberté, que seule "l'expérience de la coïncidence des contraires" peut arracher l''esprit à la gangue de la technique, elle-même fille de la raison raisonnante. A cet égard, l'auteur s'inscrit dans le droit fil de la critique de la modernité, telle que l'a naguère formulée René Guénon. Ce serait toutefois par trop le réduire que de le qualifier de "guénonien". C'est que ce philosophe platonicien, ou néoplatonicien si l'on préfère, est aussi, un poète, et c'est chez les poètes autant que chez les philosophes qu'il butine pour nous offrir son miel: les romantiques allemands, Baudelaire ou Pessoa, autant que Grégoire de Naziance, Heidegger, et surtout Nietzsche dont il parle admirablement et chez qui la philosophie et la poésie étaient justement tout un.
La pensée de Luc-Olivier d'Algange a ceci d'extrêmement original et vivifiant qu'elle est moins spéculative qu'opérative. L'on pourrait dire de ces deux ouvrages ce que l'auteur dit des cathédrales: "La cathédrale ne délivre pas seulement un enseignement didactique, ce qu'elle fit au demeurant avec une pertinence que nos modernes moyens de communication sont loin d'atteindre, elle sollicite de l'entendement humain une collaboration à la transmutation."
Michel Marmin
(Le Spectacle du monde N° 528)
*
Quatrième de couverture de L'Ombre de Venise
Il ne sera guère question de Venise dans ces entretiens qui souvent prennent la forme de monologues intérieurs... A peine de son "ombre", ou plus exactement de l'ombre d'un titre auquel Nietzsche renonça pour ces fragments, ces aphorismes, "ces provocations, ces appels" qui deviendront Aurores et Le Gai savoir; ombre qui nous accompagne dans notre voyage vers la vie magnifique, ombre qui scintille, ici et maintenant, de toute la splendeur de sa présence. Le voyageur et son ombre parleront ainsi, au fil d la promenade, du dandysme, des rapports étranges de la littérature et de la vérité, de Platon et de Nietzsche, de l'autorité et de la liberté, de la morale et du style, de l'incomprise générosité, de l'orage mallarméen, de Fernando Pessoa, de la "rhétorique de Dieu", des pays de Dante et de Novalis, de l'abîme de Dionysos et de l'abîme du Christ, d'Heidegger et des poètes chinois, du "regard de diamant", de l'attention...
"Il nous plaît, écrit Luc-Olivier d'Algange, d'écrire à l'ombre d'une cité et à l'ombre d'une oeuvre. Ces ombres ne sont pas les ombres de la caverne platonicienne, mais des ombres versicolores, venues des hauts feuillages sur notre promenade à travers la Cité éperdument architecturale, éprise de ciel et d'eau, et de leurs embrasement réciproques. Certes, les aurores qui viennent, ces aurores "védiques" dont parle Nietzsche, devront être annoncées avec tous les apparats d'une exactitude extrême. Ne rien laisser au hasard, joindre sa vision au pressentiment d'une beauté mathématique ! Tel sera le mot d'ordre qui fera tomber les propagandes. Ce miroir fabuleux qu'est l'entendement humain, qui va jusqu'à enrichir le monde qu'il reflète, est, entre son propre ciel et sa propre terre, une Cité sauvée des eaux et défiant la mort".
L'ombre de Venise est fine, elle laisse passer la lumière. La finesse de l'ombre, sa vertu picturale, présagent une nouvelle audace herméneutique. A travers L'Ombre de Venise se précise, comme en contre-jour, l'écriture des dieux, l'écriture éternellement antérieure des "registres de lumière" de ce "logos intérieur" dont parle Philon d'Alexandrie.
L'Ombre de Venise, éditions Alexipharmaque, 15 euros
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10/03/2013
FIN MARS. LES HIRONDELLES, en hommage à Joseph Joubert.
Un article d'Arnaud Bordes à propos de Fin Mars. Les hirondelles, de Luc-Olivier d'Algange.
" Luc-Olivier d'Algange. C'est un style où, comme le temps est l'image mobile de l'éternité, la langue se fait image du Verbe. C'est une pensée, profonde, érudite, romantique où, au sens métaphysique, sont le Nécessaire et le Contingent. Nécessaire: comme le monde invariant des Idées, de l'Etre. Contingent: comme le monde changeant de la nature, des apparences. Une pensée qui, comme un devin dans autant d'entrailles, sans cesse scrute les épaisseurs sédimentaires des apparences pour en exhumer, en faire surgir, l'Etre et les Idées, autrement dit, le Vrai, le Beau, et le Bien. Ainsi en est-il de Fin mars. Les Hirondelles, où Luc-Olivier d'Algange, en ultime philosophe platonicien, en poète aussi, convoque, entre autres, Henry Montaigu (et son "universalité métaphysique"), Dominique de Roux (comme "anti-moderne"), René Guénon (comme "immense promesse de poésie"), Julien Gracq ( et sa "géopoétique"), Ernst Jünger (et le "réalisme héroïque") dont, moins pour en célébrer les richesses chromatiques que pour en trouver la source lumineuse et embrasante, il étudie les reflets. Il ne s'agit pas là, comme il en serait peut-être dans n'importe quelle bavarde analyse littéraire, de reconnaître des qualités, des manières, des procédés, mais de connaître, - d'une connaissance du sacré. Fin mars. Les hirondelles est remarquable, une oeuvre (comme on ne sait plus en faire) gnostique. "
article paru dans R&A, N°35
*
Incipit à
Fin mars. Les Hirondelles
(en hommage à Joseph Joubert)
D'emblée, à lire les Cahiers de Joseph Joubert, nous sommes saisis par un sentiment de légèreté, d'enfance, un "je ne sais quoi", un "presque rien" ( selon la formule de Fénelon) qui évoque le matin profond des dialogues platoniciens, - ce moment qui précède leur exécution maïeutique ou dialectique. La pensée de Joseph Joubert fréquente l'amont. Elle scintille au vif de l'instant qui la voit naître et l'auteur ne s'y attarde pas. A trop s'attarder sur elles-mêmes, les pensées les plus justes, les plus heureuses, deviennent fallacieuses et mauvaises.
S'il est des penseurs de l'après-midi ou du soir, ou de la nuit, Joseph Joubert est le penseur du matin, du jour qui point, de la fine pointe. D'où la vertu éveillante et roborative de ces fragments, - cette façon d'aviver l'intelligence, de la cueillir, de la précipiter, comme on le dirait dans le vocabulaire de la chimie, non sans lui donner, et comme par inadvertance, une portée prophétique ou générale: " Les idées exagérées de compassion, d'humanité conduisent à la cruauté. Chercher comment.". Esprit chrétien, classique et platonicien, Joseph Joubert répugne à l'exagération, mais son goût de la mesure, loin d'être seulement un accord de la morale et de la raison, se fonde sur une intuition métaphysique. Pour Joseph Joubert, il n'est d'équilibre, d'harmonie et d'ordre que légers. L'ordre n'échappe à sa caricature que par des affinités particulières avec l'âme, la germination, la composition musicale: "L'ordre aperçu dans le mouvement: la danse, la démarche, les évolutions militaires". L'exagération de la compassion, comme toute exagération, substitue à l'âme la volonté qui est négation de l'âme. La volonté outrecuide et grince; sa dissonance est d'outrepasser les prérogatives humaines en passant à côté des bonnes actions qui naissent directement de la bonté et du coeur.
On se souvient de la phrase de La Rochefoucauld: " Cet homme n'a pas assez d'étoffe pour être bon". C'est que la bonté est un art, une force, un don, une résolution peut-être, mais nullement une volonté. Elle nous est donnée par la Providence, et nous devons la servir. Répondant aux circonstances qui la sollicitent en nous, elle ne peut exagérer; elle est juste ou elle n'est pas. La vérité et le bonheur ne se détiennent pas, ils n'obéissent pas à notre volonté: " Nous sommes nés pour les chercher toujours, mais pour ne les trouver qu'en Dieu". La belle et heureuse fidélité n'est pas crispée sur son dû. Elle est consentement à ce qui, en nous, est plus profond et plus haut que nous-mêmes et non pas volonté de faire de nous-mêmes autre chose que ce que nous sommes dans nos plaisirs et vraisemblances. De la vraisemblance à la vérité, le chemin, qui n'est pas une marche forcée, ne saurait être que providentiel.
Ainsi, par volontarisme, "le siècle a cru faire des progrès en allant dans des précipices". La suspension de jugement est bien souvent plus spirituelle que la certitude dont la volonté s'empare pour la faire servir à ses exagérations et ses aveuglements. L'humanité véritable s'exerce non dans le système, dans l'abstraction, mais dans le regard échangé, dans l'attention et le recueillement: "Porter en soi et avec soi cette attention et cette indulgence qui fait fleurir les pensées d'autrui".
Joseph Joubert distingue l'incrédulité de l'impiété, l'une n'étant qu'une "manière d'être de l'esprit", presque égale à la crédulité, alors que l'autre est "un véritable vice du coeur": " Il entre dans ce sentiment de l'horreur pour ce qui est divin, du dédain pour les hommes et du mépris pour l'aimable simplicité." L'incrédulité est une vue partielle, alors que l'impiété est une volonté. " La piété nous rattache à ce qu'il y a de plus puissant et de plus faible". Printanière, la pensée de Joseph Joubert l'est aussi par cette déférence à l'égard de la fragilité, par ce sens du tragique, du caractère irremplaçable de tout ce qui est, par la soumission à l'impératif divin qui fonde en son unificence chaque chose qui existe, et dont l'existence est, par voie de conséquence, à nulle autre semblable. La beauté du principe resplendit en chacun: " L'un est tout ce qui n'est pas lui". (...)
*
Sommaire:
1. Joseph Joubert
2. Ce Printemps d'Aquitaine, notes sur l'oeuvre de Henry Montaigu
3. René Guénon, écrivain français
4. Hommage à Gustave Thibon
5. Le Songe impérial de Dominique de Roux
6. Gomez Davila ou "les droits de l'âme"
7. André Suarès, une vision paraclétique
8. Cicindèles, notes sur l'oeuvre d'Ernst Jünger
9. Clavis hermeneutica,- notes sur l'oeuvre de Henry Corbin
10. Le "Voyage en Dieu", - Notes sur Le Livre de l'Homme Parfait d'Azîzoddin Nasafî
11. L'Envers de la vague,- notes sur l'oeuvre de Julien Gracq
12. Le Voyage intérieur.
*
(Fin mars. Les Hirondelles,éditions Arma Artis, 209 pages, 22 euros.)
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07/03/2013
Un article de Christopher Gérard
Propos réfractaires
de Luc-Olivier d'Algange.
Lecteur ébloui de Balzac dès l'âge de dix ans, Luc-Olivier d'Algange a retenu de ses multiples éveilleurs, parmi lesquels Raymond Abellio et Henry Montaigu, comme d'immenses lectures, de Platon à Nietzsche, qu'il faut "sauvegarder en soi, contre les ricaneurs, le sens de la tragédie et de la joie".
Dans son dernier opus, Propos réfractaires, un recueil de reflexions bien incorrectes, il exhorte ses lecteurs à résister à la mise-au-pas opérée par le Gros Animal, celui dont la technique d'asservissement consiste à "effrayer, épuiser, distraire". Adepte d'une pensée anagogique et initiatique, en un mot aristocratique, Luc-Olivier d'Algange entend préserver sa commanderie la plume à la main et continuer à célébrer l'ensorcelante beauté du monde, malgré la laideur qui s'étend - et il faut le louer de préciser: une laideur à quoi le monde ne se réduit jamais. Ce contre-moderne qui ne se complaît donc pas dans la déploration morose a le sens latin de la formule: "Un homme qui garde un secret est un vivant rempart contre l'infamie", ou encore celle-ci dans laquelle je ne puis que me reconnaître, surtout en ces temps de chasse à courre: " Nos meilleurs écrivains ont du cerf, du renard ou de sanglier - et comme ce dernier, ils vont seuls".
Propos réfractaires est donc un manifeste, celui des écrivains "hostiles aux voies ferrées", ceux qui se verraient plutôt du côté de Peter O'Toole, à faire dérailler les trains de l'armée ottomane ! Ce recueil sera lu comme une exhortation à maintenir, contre toute forme d'hébétude et d'anesthésie, les yeux ouverts sur le monde et à honorer tout ce que notre société, celle des Modernes, offense et bafoue. Dandysme vain ? Pose pseudo-aristocratique ? Nenni: l'homme d'Algange est un passionné, un rebelle à la massification comme aux formes nouvelles d'obscurantisme, un fidèle d'Aphrodite aux mille parfums. Un platonicien de l'ancienne France royale et chevaleresque comme jamais ceux de Perse ou de Cambridge. Un gnostique au sens hellénique qui appelle à la reconqête de notre souverainté intérieure, mais qui sait que " le Diable rit chaque fois qu'il parvient à opposer un corps et un esprit, et exulte chaque fois qu'il parvient à anéantir un esprit par le corps". Un impertinent qui soutient que le premier droit de l'homme est le droit au silence, un écrivain qui sait que "tracer des mots avec de l'encre du du papier est un acte prodigieux".
Luc-Olivier d'Algange ou le fol en Dionysos.
*
Extraits de Propos réfractaires, éditions Arma Artis
Il y a deux sortes d'écrivains: ceux qui se souviennent de l'éclat sacré du signe, du hiéroglyphe, de la rune, et qui savent qu'ils se livrent à un cérémonial magique dont l'écriture proprement dite n'est qu'un moment, - et les autres, qui écrivent n'importe quoi, n'importe comment. Ceux qui savent que tracer un mot avec de l'encre sur du papier est un acte prodigieux, et ceux qui l'ignorent.
*
Ecrire en poète, c'est combattre l'indéfini avec les armes de l'infini.
*
Ce que l'on nomme l'invisible est, en réalité, visible à certains moment et aux pointes extrêmes.
*
La société nous fait entrer dans la case d'un formulaire administratif, la civilisation nous en fait sortir en nous reliant à la diversité des influences. La société nous fait vivre dans un hic et nunc abstrait et carcéral, la civilisation dans une présence qui est un armorial, un vitrail. La société nous identifie; la civilisation nous éveille à nos filiations spirituelles et nos appartenances métaphysiques. La société nous établit dans une singularité où nous sommes interchangeables, la civilisation nous différencie, nous distingue, nous hiérarchise dans le secret du temps et donne à la réalité transitoire les éclats de la légende.
*
Il ne suffit pas de témoigner des principes, il faut encore combattre la tyrannie des écorces mortes. La négation de la négation est nécessaire aux temps où nous sommes. S'en dispenser serait se livrer, pieds et poings liés, à la parodie. Là où nous sommes, nous ne pouvons aller directement à la vérité et à l'unité. Ce fut l'illusion funuste des utopies. D'où, dans toutes les traditions, ces constants appels à l'humilité. Humus, la terre, empreinte visible d'un sceau invisible.
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Un poème de Jean Parvulesco
Pour les nuages argentés d'Ecosse
le fondement de la poésie est l'espérance, comprenons
l'envol prémonitoire des grouses dans les bruyères
teintes en rouge, avec leurs tabliers en cuir bouilli,
avec le goût amer de la confession au fond de la gorge,
les intermédiaires avides de continuation s'égayent à
travers les collines: parfois une jeune femme apparaît,
que le malheur avait poussé vers les Portes de Plomb:
quand traversée les rivières ancestrales, sa chair
s'attendrit, on la dépouille de sa blanche tunique, et salée
celle-ci rejoint l'hommage à la Méridienne, sous l'allée
extrait de India, revue STYLE, été 1988
*
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06/03/2013
A propos de Villiers de l'Isle-Adam
Extrait d'un article de Philippe Barthelet ( Valeurs Actuelles, 26 avril 2012)
Axël
d'Auguste de Villiers de L'Isle-Adam
La vertigineuse beauté de ce drame, l'un des plus nobles et des plus étranges de notre théâtre, contredit à elle seule cette loi d'insignifiance qui, de la tragédie classique au mélodrame romantique, veut que le fond soit sacrifié à une forme de plus en plus incertaine. Axël est un traité de "haute magie" dont un de nos écrivains les plus purs a fait ce "mystère" d'un genre inédit, - soit l'initiation d'un élu et la traversée successive des mondes religieux, tragique, occulte, passionnel, jusqu'à l'héroïque délivrance que seules les âmes moins bien empennées prendront pour un suicide: "Vivre, les serviteurs feront cela pour nous". L'éditeur Arma Artis, a eu l'heureuse idée de le faire préfacer par Luc-Olivier d'Algange, non pas un spécialiste de Villiers de L'isle-Adam, mais son héritier."
*
Préface à Axel de Villiers de l'Isle-Adam ( extrait)
Les préfaciers qui, parfois, mesurent mal l'honneur qui leur est fait de présenter un oeuvre, c'est-à-dire de la rendre présente, de la restituter à cette présence réelle qui est faite de ressouvenir et de pressentiment, abusent en général des références historiques. Par crainte de s'impliquer eux-mêmes dans l'oeuvre qu'ils devraient défendre, et avec laquelle la chance leur est offerte d'entrer en conversation, ils s'évertuent à "l'insérer dans son temps", non sans la prétention un peu vaine de l'expliquer par les circonstances qui la virent naître. Le pessimisme, la rage, ou, plus vaguement les "idées" de tel auteur auraient ainsi pour cause, une guerre passée, le déclin de la classe sociale à laquelle il appartient; lorsque qu'on ne cède pas, la mode en étant heureusement un peu passée, à la psychologie ou à la psychanalyse.
Cette mise à distance de l'oeuvre par le contexte, en fournissant au lecteur des pincettes articulées pour s'en saisir, laisse la désagréable impression que le commentateur de l'oeuvre n'était là que pour en interdire l'accès. On sous-estime l'esprit de vindicte de l'éxégète qui se venge, comme il peut, du mal que lui a donné telle oeuvre qui ne s'adressait pas à lui, mais à des esprits plus aventureux. Les oeuvres sont à la fois plus profondes et plus ingénues que ne l'envisagent les spécialistes. Leur prétendue "difficulté" n'est, le plus souvent, qu'une invention des cuistres qui s'imaginent ainsi se rendre indispensables, ou d'idéologues que les libres propos de l'auteur offusquent.
Or par un paradoxe dont le sens mériterait d'être approfondi, plus les oeuvres s'éloignent de nous dans le temps et mieux elles s'offrent immédiatement à notre appréhension; moins elles nécessitent de gloses. Ce qu'il faut savoir du temps et de la vie de l'auteur est dans l'oeuvre elle-même: là commence le chemin vers l'intérieur, ésotérique (...)
Luc-Olivier d'Algange
Axël de Villiers de l'Isle-Adam, éditions Arma Artis.
" Je ferme, entr'ouverts le temps d'y mettre quelque signet magistral, aux coulantes pierreries comme d'incluses richesses d'ironie et de foi, Axël et L'Eve future; et confie à vos minutes d'élection ces tomes-là, dont un, à votre choix lequel, moi je ne sais, magnifie l'auteur qui à quelque crise de son talent l'a conçu; où la conjonction des deux facultés ennemies atteste une intelligence souveraine"
Stéfane Mallarmé
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04/03/2013
Henry Montaigu, poète français.
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03/03/2013
Journal désinvolte O3/03/2013
Quand bien même ne penserions-nous jamais à la postérité, il n'en demeure pas moins qu'une pensée écrite est sauvée du périssable de notre carcasse. Elle ne l'est pas lointainement, mais tout de suite. Ecrite, ou dite à quelqu'un qui s'en souviendra, une pensée instaure une autre temporalité, ou, plus exactement, elle révèle une profondeur du temps, une réverbération d'éternité. Cette éternité est toute vive, jeune et frémissante, une apogée de l'Eros, exercée par le Logos.
*
Après avoir traversé un certains nombre de pays, en flâneur et contemplateur, et non en touriste; après avoir rencontré, en chair et en esprit, maintes personnes dans les milieux les plus divers, et m'être livré avec avec elles à des aventures et des activités diverses, parfois avouables, il reste que la lecture de certains livres me fut une belle et grande aventure, et je plains ceux qui sont passés à côté.
*
Logique de la consommation: ne laisser aucun héritage, et, si possible, détruire tout héritage, y compris l'héritage naturel. Le discours bourdieusien contre les "héritiers" conduit à l'apologie du règne de la consommation. S'il n'est plus aucune supériorité héritée, il appartient à l'argent de donner à chacun sa place. L'héritage implique des devoirs. La fortune faite se croit tous les droits, jusqu'à la plus infâme goujaterie.
*
A la "haine du secret" dont parlait René Guénon, s'ajoute la haine de la complexité, des espaces libres, éclairés ou ombreux. Notre inclination à la servitude volontaire répugne à tous les exercices que ces espaces rendent possibles. C'est ainsi que la servitude préfère vivre dans une société plutôt que dans un pays, peuplé de noms de pays, de libertés et de franchises héritées. Cependant, ne nous crispons pas sur notre dû. Laissons les formes s'évanouir, les richesses prendre d'autres formes. Notre fief, notre château tournoyant est là où nous sommes droits, - là où le temps profane entre en intersection avec le temps sacré.
*
La raison d'être n'a rien de rationnel: elle est une immédiate épiphanie (étant entendu que le rationalisme fut toujours le principal ennemi de la logique)
*
Musique d'ambiance, écrans, bruitages, bavardages, despotisme affectif et économique, architecture de masse, - laideur. Tout est matériellement mis en oeuvre pour éloigner les épiphanies ou les rendre indiscernables. Cet immense chantier quantitatif est vain. L'épiphanie est une qualité qui s'adresse à une qualité.
*
Nouvelle censure: non plus brûler les livres ou les interdire, mais faire en sorte que nul ne puisse plus les comprendre. Tâche titanesque, que nous voyons à l'oeuvre, mais tout aussi vaine. Il suffit d'un seul pour faire la différence entre ce qui est et ce qui n'est pas.
*
Preuve de l'irresponsabilité des politiques et les journalistes: ils instillent la peur, qui réduit les facultés intellectuelles et morales, favorise l'agressivité et réduit à vivre en bêtes traquées. Tout acte de bonté est presque toujours une victoire remportée sur la peur, de même que toute vilénie en est la défaite. L'adage est juste: la peur est contagieuse; elle s'en trouve être le principal moteur du grégarisme, des mouvements de foule. La meute des chiens qui ont peur est d'autant plus dangereuse que nous nous en laissons davantage effrayer. C'est en de telles circonstances qu'il faut éviter de fuir.
*
Mais plus encore qu'à la bonté, la victoire sur la peur ouvre à la Surnature. Encore faut-il que cette victoire ne soit pas seulement une précipitation vers le danger (qui peut être, elle-même, poussée par la peur). Vaincre la peur, ce n'est pas se raidir, c'est apprivoiser tout ce qui se trouve autour de son objet ou de sa cause.
*
Se mettre en danger, c'est parfois trouver la sente merveilleuse et incertaine qui nous sauve des pires dangers: ceux-là qui participent de nos habitudes, de notre confort, et de nos représentations sociales.
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Pour une âme civilisée par une tradition d'honneur, de fidélité et de bon goût, la crainte de la mort vient au second plan. Toute vie qui ne peut se sacrifier ne vaut d'être vécue. Il est probable que toute vie soit sacrifiée, toujours et pour chacun, y compris aux raisons les plus futiles, aux illusions les plus funestes. L'égocentrique sacrifie sa vie à son "moi", de façon aussi radicale que le patriote sacrifie sa vie à la Patrie, ou le poète, à son Oeuvre. La différence est dans la nature du feu sacrificiel, la beauté des flammes et le parfum des essences. Les vies sacrifiées à la cupidité puent et crapotent. D'autres flammes, plus hautes, éclairent et embaument. Quoiqu'il en soit, nous serons sacrifiés, mais nous revient la liberté souveraine de choisir notre sacrifice.
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Tout profaner pour éviter ce choix, c'est se précipiter dans le vide par crainte de l'abîme et choisir finalement "l'abîme de la nuit" contre "l'abîme du jour", pour reprendre la distinction de Raymond Abellio. La règle les ricaneurs, à cet égard, est aussi rigoureuse que celle de Saint Ignace de Loyola: ils obéïssent comme des cadavres à la mort qui est leur seul horizon. Ceux qui ricanent de tout vivent dans un monde d'une effrayante tristesse.
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La vie humaine, une alternance de combats et d'épiphanies: le reste est faux-semblant.
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Derniers livres parus:
Entretiens avec des Hommes remarquables (collectif), préface d'Alain de Benoist, éditions Alexipharmaque
Propos réfractaires, éditions Arma Artis
Lux umbra dei, éditions Arma Artis
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GRAAL-MIROIR 1987
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28/02/2013
Journal désinvolte 28/02/2013
Le sort réservé aux meilleurs de nos écrivains ne plaide guère en faveur de la société qui s'est emparée de ce pays. Du dix-neuvième siècle, il semblerait que nous eussions hérité plus particulièrement des "ligues de vertu" (pseudo-féministes, -anti-racistes,- hygiénistes, - démocratiques, - religieuses etc...) qui surveillent les esprits, donnent et refusent l'imprimatur pour des "raisons" dont Théophile Gautier se moquait déjà dans son exquise et virevoltante (et redevenue, dans son propos, contemporaine au suprême) préface à Mademoiselle de Maupin.
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Les esprit qui tombent sous ce joug puritain, et n'ont pas assez de coeur ou d'étoffe pour le défier ou l'ignorer, voient leur langue réduite à un idiome étrange, où certains mots sont proscrits, où d'autres acquièrent un sens fallacieux et figé. Ce n'est plus la langue de bois, qui sonnait creux, mais une langue de plastique, - mais sans plasticité, lisse et dure comme un monde parfaitement imperméable au réel.
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Lorsqu'il y a trop de raisons de se tirer une balle dans la tête, l'acte n'en vaut plus la peine.
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Nos ennemis nous veulent à leur ressemblance, plein de rancoeurs, rongés par cet "ulcère de l'âme", l'envie. Ils nous taquinent en espérant susciter en nous le même sentiment de grief qu'ils éprouvent à notre égard, et qui les ronge. La fascination que nous exerçons sur ceux qui nous haïssent voudrait une réciprocité, une contre-partie. Ceux qui n'ont presque plus de raison voudraient nous la faire perdre: prosélytisme du toxicomane, - ce qui rend tout prosélytisme suspect. Veut-on nous faire partager un bienfait, ou une tare ?
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Dans la prosélytisme idéologique, la pression morale s'exerce presque toujours pour nous faire renoncer à un plaisir des sens ou de l'intelligence, et perdre notre désinvolture. La joie est chez ces gens-là, un argument contre. Plus honnêtes hommes sont les écrivains qui racontent, pensent, poétisent, suspendent leurs jugements et font de leurs tristesses mêmes le principe d'intenses joies artistiques.
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L'époque moderne, prétendument "éclatée", festive, libérée, est la mieux étouffée par un prosélytisme maniaque, lancinant et sinistre dont les saturnale elles-mêmes ne sont plus que l'expression commerciale et bien-pensante.
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Entre la fête dionysiaque, antique ou médiévale, et la fête moderne, la différence est que l'une était en contrepartie de l'ordre apollinien ou théologique, un suspens, alors que l'autre est l'expression bruyante de l'ordre établi.
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Le totalitarisme advient lorsque les saturnales ne sont plus le retournement de l'ordre établi, mais son prolongement, lorsque l'ordre est plat, pure planification, sans avers ni envers. Idéologie dominatrice, sous des aspects divers en apparence contradictoires; extraordinaire puissance des sucs gastriques pour dissoudre et digérer les subversions, et qui ne trouvera en face d'elle que de calmes adeptes des causes perdues... Nous soulignons le calme car tout énervement nous prive de notre nerf, de notre force nerveuse, et nous fait glisser en tous sens sur des surfaces planes disposées à cet escient: faire de nous des êtres de nulle part, dans un relativisme général. Le plan, au demeurant, est incliné. Il nous verse dans une indistinction semblable à la mort.
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Les merveilleuses croyances où les hommes continuent à être distingués après leur mort apparaissent comme une riposte à la toujours menaçante indifférentiation des vivants. Si nous ne sommes pas interchangeables après la mort, l'honneur de la vie est sauf.
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Derniers livres parus:
Entretiens avec des Hommes remarquables (collectif), préface d'Alain de Benoist, éditions Alexipharmaque
Propos réfractaires, éditions Arma Artis.
Lux umbra dei, éditions Arma Artis.
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27/02/2013
Deux lettres de Raymond Abellio
Vence, le 5 février 1986
Cher Luc-Olivier d'Algange,
La revue Pictura et votre lettre m'ont été retransmises à Vence, où je passe durant l'hiver, la majeure partie de mon temps. Merci pour l'une et l'autre et tous mes compliments pour votre article sur les néoplatoniciens: vous y abordez de grands et multiples sujets, dans une parfaite clarté, ce qui n'est pas si simple, et j'y ai retrouvé avec bonheur nombre de thèmes qui me passionnent et dont je serais heureux de parler avec vous. Car nous pouvons, si vous le désirez, nous rencontrer, soit ici, soit à Paris, soit à Toulouse où je serai, en principe, au début du mois de mai.
N'ayant reçu Pictura qu'hier soir, je n'ai pu lire que votre article dont je ne vois pas encore comment il s'intègre au reste de la revue, mais peut-être cet éclectisme est-il voulu. Dites-moi ce qu'est Pictura.
Vous donner un texte m'est plus difficile que vous rencontrer; je travaille en ce moment à un essai qui me prend tout mon temps et me fatigue beaucoup. A mon âge, il est à peu près impossible de mener deux choses de front. Mais j'ai avec moi un petit groupe d'amis bien plus compétent en matière de Kabbale et de Yi-king, par exemple. Je pourrais les mettre en rapport avec vous.
Soyez assuré en tous cas du vif plaisir que j'ai à vous lire, et, en attendant de faire votre connaissance, croyez-moi, je vous prie, bien sympathiquement vôtre.
Raymond Abellio.
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Vence, le 27 février 1986
Cher Luc-Olivier d'Algange
Un grand merci pour votre envoi (lettre et article destiné à Question de). Question de est une revue que je connais bien et qui, en gros, m'a toujours soutenu. Robert Amadou, qui y écrit, est mon ami. Je n'en dirai pas autant de l'Université en général, à l'exception de non-conformistes comme François George, qui dirige la revue Liberté de l'Esprit, fort éclectique, il est vrai, - mais il faut être agrégé de philosophie pour être admis dans le milieu professoral, et le groupe d'influence qui s'est créé autour de Foucault, Barthes, Derrida, Lyotard, est encore tout puissant, et l'accès à la collection La Bibliothèque des Idées, chez Gallimard, est devenu impossible, je pense, à qui n'est pas "du métier". La parution de la "Structure Absolue" n'y fut possible que grâce aux efforts d'un ami politique, Robert Carlier, qui sut convaincre Michel Deguy. Il y fallut quand même des mois de palabres.
Je serai à Toulouse le 29 avril pour une conférence à l'Hôtel d'Assezat, sous l'égide de l'Académie des Jeux Floraux et resterai dans ma bonne ville natale (qui m'a remarquablement ignorée jusqu'ici) jusqu'au 3 mai. Nous pouvons nous rencontrer avant, à Paris ou à Vence, si vous le désirez, mais ce séjour à Toulouse nous donnera toute liberté.
A bientôt donc, et toujours bien sympathiquement vôtre
Raymond Abellio.
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