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09/02/2013

Journal désinvolte de Luc-Olivier d'Algange, 10/02/2013

Les grands livres, eux aussi, creusent en nous un vide enchanté, ne fût-ce qu'en nous vidant de nos ressassements infirmes, en poussant aux périphéries de l'attention ce qui occupe la pensée sinistrée de nos contemporains. L'attention soudain délivrée du subalterne, du morbide, de l'obsession, s'ouvre à l'infinité de l'infime, à la simplicité du grandiose. Le Logos, alors, nous honore de ses vertus et une souveraine liberté nous vient à le servir.

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Se défier des philosophes, des ésotéristes qui, tout en parlant de sagesse, semblent crispés sur le dû et se perdent en polémiques hargneuses, personnelles. La sagesse est équanime et légère, ou point du tout.

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L'indignation est le talon d'Achille des grands esprits et la tourmente des petits.

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Chaque heure paradisiaque peut être gachée par la considération excessive d'un détail. "Ce qui ne va pas". Quotidienne propagande médiatique reproduite, à l'identique, dans chaque individu qui croit ainsi faire preuve d'esprit critique alors qu'il se laisse hypnotiser par le plus petit aspect du réel qui lui permettra de dénigrer tout le reste. Le nihilisme n'est pas le propre des "penseurs". Il est ce mouvement de fond auquel, par démagogie ou inclination personnelle, certains intellectuels se raccrochent, - et s'offrent ainsi à bon compte le plaisir d'avoir l'air malin.

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Les meilleurs écrivains sont des héros. Tant d'efforts pour perdre la considération sociale, pour se déclasser, devenir pauvre, se faire insulter par les cuistres et les bien-pensants. Le monde moderne est ordonné de telle sorte à récompenser l'incompétence, la vilénie, - et par dessus tout, l'ennui et la soumission. Rien d'étonnant à ce qu'une civilisation périclite en accéléré.

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La Monarchie était sensiblement mieux une république que ne le sont nos démocraties. Plus nos démocraties liquident l'héritage royal et plus elles s'éloignent de la res publica: on s'afflige d'avoir à énoncer, contre l'opinion générale, de telles évidences.

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Ce qu'il est presque devenu impossible d'être, dans la disparition de la Geste française: Athos, Porthos, Aramis et d'Artagnan. Alexandre Dumas, de nos jours, serait interviouvé, à longueur d'émissions "culturelles" sur ses origines ethniques, sur sa difficulté à "s'intégrer", sur son "droit à la différence". En perdant la France, nous ne perdons pas seulement une nation, une subjectivité collective, mais l'espace d'une façon d'être illustrée par ces héros de roman. Rabougrissement de l'entendement humain lorsque l'argent, le chiffre, la quantité prennent la place des Saints, des héros et des légendes. La raison s'étiole en même temps que le merveilleux. Entendre aussi, derrière la France, la Gaule mythologique de L'Astrée d'Honoré d'Urfé.

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Les Modernes dépeuplent  les lieux qu'ils s'approprient, en expropriant leurs hôtes légitimes. Tout ce qui tombe en leur pouvoir devient fantomatique, anonyme, désorienté. Le reste est laissé à sa fonction de décor pour touristes, monuments historiques ravalés, tristes muséologies. Il n'est pas dit cependant que nous serons submergés par ce nulle part. Nous reprendrons tout au début, à l'instant de l'arc-en-ciel, de l'apparition; nous inventerons n'importe où l'espace à notre mesure. Ce que le monde désacralise, rien, sinon une mauvaise timidité, ne nous interdit de le sanctifier.

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Derniers livres parus:

Propos réfractaires, éditions Arma Artis. www.arma-artis.com

Lectures pour Frédéric II, éditions Alexipharmaque. www.alexipharmaque.net

 

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